Frontières et confins

Autour du thème central des grandes voies d’échanges est-ouest et nord-sud (les « routes de la Soie » et leurs antécédents, la « route de l’Inde » et celle des steppes), l’équipe s’implique dans la recherche sur les réseaux et les mobilités sur la longue durée. Les travaux déjà conduits pour mieux cerner les aires culturelles et les zones d’échanges entre l’Asie centrale, l’Asie du Sud et les steppes, nous ont amenés à réfléchir sur la notion de frontière, sur laquelle nous mettrons l’accent durant le quinquennal 2025-2029.

C’est dans cette perspective qu’a été élaboré le projet ANR JCJC FRONTIER. Imperialism at the edge: Central Asian empires on the borderlands during Antiquity. Porté par O. Bordeaux en collaboration avec d’autres membres de l’équipe, ce programme de recherche centré sur l’Antiquité tourne autour de la problématique : Où tracer la frontière d’un empire ?

Dans le contexte centrasiatique, qui mêle mondes des steppes et des oasis, la cohésion territoriale des empires repose sur une politique d’expansion intense et multiscalaire, ainsi que sur l’émergence de larges réseaux d’échanges. L’approche classique « centre / périphérie » ne rend que partiellement compte de la notion de frontière (comprise comme un espace d’interactions avec ou sans délimitation précise), à savoir sa manifestation, sa perception et sa perméabilité.  
Le projet se concentrera d’abord sur les limites de ces empires (achéménide, hellénistique, kouchan, Qin puis Han) qui émergent entre le Ve siècle avant notre ère et le Ve siècle de notre ère et se distinguent par l’intensité de leurs interactions culturelles et commerciales. L’attention des chercheurs s’est jusqu’ici particulièrement portée sur le cœur de ces empires et sur la traduction parmi les élites du multiculturalisme induit par ces échanges. Associant données archéologiques, architecturales, épigraphiques, numismatiques et art rupestre, nous nous intéresserons plus particulièrement à ce que l’expansion des empires sous-entend en termes d’ancrage territorial à construire intellectuellement et matériellement (politique religieuse, idéologie royale, réseaux diplomatiques, contrôle des voies de commerce).

Cette recherche sur le concept de frontière, étendue à des périodes plus anciennes, s’accompagnera d’une réflexion théorique sur des espaces qui ne sont pas seulement des zones de contact, mais aussi des zones de cohabitation où des civilisations différentes se retrouvent. Cette réflexion s’appuiera sur nos travaux sur le Chalcolithique (Thématique 1, prog. 1 et 2), et sur des sites du Bronze de la civilisation de l’Oxus comme Sarazm au Tadjikistan, de l’Indus au Pakistan, et du Tarim au Xinjiang.

Dans un autre registre, la réflexion sur le fonctionnement des sociétés et sur les modèles d’urbanisation, distincts des noyaux mésopotamiens, sera poursuivie en lien avec nos fouilles qui apportent un nouvel éclairage sur le développement des villes, leur organisation sociale, la spécialisation artisanale et la question de l’origine des inégalités.

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