Réchauffement climatique, programme “tombes gelées”
et fouille à Berel’ (Kazakhstan)

Réchauffement climatique

Le réchauffement climatique fait fondre le pergélisol et entraîne la décomposition de l’exceptionnel patrimoine gelé des quatre pays de l’Altaï (Chine, Kazakhstan, Mongolie, Russie). Dès 2006, l’expertise d’H.-P. Francfort avait été requise auprès de la Division du Patrimoine de l’UNESCO qui a pris la mesure du problème. Aux côtés des archéologues, restaurateurs, climatologues, géographes, géocryologues des pays-hôtes, l’UNESCO regroupe des experts internationaux, dont notre équipe, pour créer un groupe scientifique international de monitoring (et de fouilles si nécessaire) des tombes gelées.

Le réchauffement climatique fait aussi peser d’autres menaces sur le patrimoine mondial (montée du niveau marin, force accrue des phénomènes météorologiques, désertification). Durant la présidence française de l’UE en 2008, H.-P. Francfort a organisé avec l’appui du MAEE une exposition au parlement européen de Strasbourg et publié un livret (ci-contre), repris en 2009 sous forme de DVD pour diffusion dans le réseau des ambassades.

Programme “Tombes gelées”

Un programme dédié à l’étude des “tombes gelées” fut conduit à partir de 1987 dans le cadre de la MAFAC en coopération avec l’Institut d’Archéologie Margulan de l’Académie des Sciences-Ministère des Sciences du Kazakhstan. Programme d’échanges et de publications à l’origine, il fut lié à l’étude des pétroglyphes d’Asie centrale et favorisa d’autres travaux de terrain, notamment en archéologie funéraire. Il avait pour objectif de combler, par toutes ses composantes (art rupestre, tombes, néolithique), un vide des connaissances entre les régions mieux étudiées de l’Asie centrale des oasis (Ouzbékistan, Tadjikistan) et de la Sibérie méridionale (Khakassie, Altaï). L’une de ses opérations prioritaires fut la recherche de kourganes gelés dans les Tianshan-Alatau ou dans l’Altaï kazakhstanais. L’étude des matériaux organiques collectés, là comme au Xinjiang, est primordiale. Cette opération s’est effectuée avec des collaborations locales et des partenariats européens : Centro Studi Ricerche Ligabue de Venise (Italie), Université de Gand (Belgique).

Fouille du kourgane n°11 de Berel’ (Altaï, Kazakhstan)

De 1997 à 2000, l’équipe a découvert et fouillé dans l’Altaï en coopération franco-italo-kazakhstanaise (co-direction Z. Samashev et H.-P. Francfort avec G. Ligabue) le kourgane n°11 de Berel’. Ce kourgane a livré quantité de vestiges organiques, tant dans la chambre funéraire que dans la fosse attenante où treize chevaux entièrement harnachés avaient été sacrifiés (brides ornées, selles en textiles polychromes, etc.). L’analyse et l’exploitation de toutes ces données a révélé des rapports nets avec l’art achéménide, mais postérieurs à la fin de l’empire perse selon la toute récente chronologie de l’Altaï (C14 et dendrochronologie de tous les kourganes). De nouvelles découvertes en Touva et en Mongolie permettent de placer les ornements de Berel’ dans l’évolution de l’ensemble de l’art des nomades des steppes.

Fouille d’un kourgane gelé sur le site de Berel’. A la fin de la fouille, conditionnement du sarcophage, monoxyle creusé dans un gros mélèze, pour son enlèvement de la fosse.

© MAFAC

Fouille d’un kourgane gelé sur le site de Berel’. A la fin de la fouille, conditionnement du sarcophage, monoxyle creusé dans un gros mélèze, pour son enlèvement de la fosse.

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Après enlèvement de la toiture de la chambre funéraire, on peut examiner sa construction en planches assemblées par des feuillures, et le sarcophage en place. Ce cercueil, posé sur une plate-forme de petites dalles de pierre, était fermé par un couvercle en bois fixé aux quatre angles par quatre clous ornés de griffons rapaces de bronze.

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Barrette de mors aux mouflons. Cette pièce de harnachement était sur le même cheval que la pendeloque au mouflon. Les barrettes ou ailes de mors étaient fixées dans des anneaux aux extrémités du mors, à l’extérieur de la bouche du cheval. Les brides en cuir de la têtière s’y rattachaient.

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Publications (sélection)
  • Francfort H.-P., 1997, « Note sur les animaux composites de Tamgaly : Le Cheval cornu », Bulletin of the Asia Institute, 9, p. 185-198.
  • Francfort H.-P., Ligabue G., et Samashev Z., 1998, « Découverte d’une tombe gelée d’époque scythe (IVe s. av. J.-C.) à Berel’ dans l’Altaï (Kazakhstan oriental) », CRAI, (novembre-décembre), p. 1165-1175.
  • Mar’jashev A. N., Gorjachev A. A., et Potapov S. A., 1998, Kazakhstan 1 : choix de pétroglyphes du Semirech’e (Felsbilder im Siebenstromland) (Répertoire des Pétroglyphes d’Asie centrale, fascicule n° 5), (Mémoires de la Mission Archéologique Française en Asie Centrale, vol. V.5), Paris, De Boccard.
  • Samashev Z. S., Bazarbaeva G. A., Zhumabekova G. S., et Francfort H.-P., 2000, « Le kourgane de Berel’ dans l’Altaï kazakhstanais », Arts Asiatiques, 55, p. 5-20.
  • Francfort H.-P. (éd.) 2008. Archéologie et changement climatique : un patrimoine menacé. Catalogue de l’exposition au Parlement européen de Strasbourg (20-23 octobre 2008). Paris : Ministère des Affaires Étrangères et Européennes, 31 p.
  • Francfort H.-P. 2008. Ancient Altai Culture and its Relationship to Historical Asian Civilizations. In : Han J. (éd.), Preservation of the Frozen Tombs of the Altai Mountains, p. 35-40. Paris : UNESCO.
  • Francfort H.-P. 2008. Le cheval dans les arts de l’ancien Orient, des origines aux Achéménides. In : Ayala (de) R. (éd.), Le cheval dans l’art, p. 67-100. Paris : Citadelles et Mazenod.
  • Bendezu-Sarmiento J., Francfort H.-P., Ismagulova A., Samashev Z. 2008. Post-mortem mutilations of human bodies in Early Iron Age Kazakhstan and their possible meaning for rites of burial. Antiquity 82-315, p. 73-86.
  • Francfort H.-P. 2009. La mort chez les Scythes de l’Europe à l’Altaï : la culture de Pazyryk et ses prédécesseurs à la lumière de quelques découvertes récentes. In : Guilaine J. (éd.), Sépultures et sociétés. Du Néolithique à l’Histoire. Séminaire du Collège de France, Collection des Hespérides, p. 153-192. Paris : Éditions Errance.
  • Francfort H.-P., Lepetz S. 2010. Les chevaux de Berel’ (Altaï) – Chevaux steppiques et chevaux achéménides : haras et races. In : Gardheisen A., Furet E., Boulbes N. (éds.), Histoire d’équidés : des textes, des images et des os. Actes du colloque organisé par l’UMR5140 du CNRS (Montpellier, 13-14 mars 2008), Monographies d’Archéologie Méditerranéenne, Hors série 4, p. 57-104. Lattes : Édition de l’Association pour le Développement de l’Archéologie en Languedoc-Roussillon.
  • Francfort H.-P. 2014. Pratiques guerrières dans les steppes et les oasis de l’Asie centrale au premier millénaire av. J.-C. In : Faire la guerre, faire la paix. 136e Congrès annuel des sociétés historiques et scientifiques (Perpignan, mai 2011).
Équipe

Responsable : Henri-Paul FRANCFORT
Participants et collaborateurs :
J. BENDEZU (Post-Doc Paris 1)
Eric CRUBEZY : UMR 8555 (Professeur, Laboratoire d’Anthropologie moléculaire) et Université Paul Sabatier, Toulouse
Sébastien LEPETZ (USM 303, Département Écologie et gestion de la biodiversité) : UMR 5197 (Archéozoologie, histoire des sociétés humaines et des peuplements animaux), CNRS – Muséum National d’Histoire Naturelle
Pr. Bertrand LUDES, Dr. Annie GERAUT et Christine KEYSER-TRACQUI : Institut médico-légal, Strasbourg
Françoise BOUCHET, Matthieu LE BAILLY : Université de Reims, UFR de Pharmacie, Laboratoire de paléoparasitologie CNRS UMR 5197