Programme 2 : urbanisation (ou non) en Asie centrale

Ce programme étudie, dans les sociétés agraires, l’émergence, ou non, de civilisations urbaines à l’âge du Bronze, leurs interactions mutuelles et avec les groupes steppiques. Il appréhende la genèse des deux civilisations urbaines majeures de l’Asie protohistorique : celle de l’Oxus (c. 2500-1700) et celle de l’Indus (dite aussi harappéenne, c. 2500-1900), mais aussi celles n’ayant pas connu de développement urbain (Xinjiang, steppes, c. 2000-350). L’équipe s’attache à caractériser leur originalité au regard des autres civilisations urbaines de Mésopotamie et de Chine.

Les terrains de la MAFAC au Tadjikistan1 éclairent une période de transition encore mal connue, le Chalcolithique (Ve-IVe mill.), qui voit se constituer, dans les grands bassins fluviaux de l’Amou-Daria et du Zeravchan, les premières civilisations proto-urbaines des oasis et celles, plus mobiles, des steppes. Le site UNESCO de Sarazm (IVe-IIIe mill.), bien qu’excentré au cœur des montagnes, est unique par son assemblage multiculturel et sa composante steppique. Il permet des travaux novateurs sur la genèse du phénomène urbain et de la civilisation de l’Oxus, ainsi que sur les liens tissés de la Sibérie au Xinjiang et à l’Himalaya, et jusque dans le monde syro-mésopotamien. Plusieurs monographies sur la question sont en préparation ou sous presse. La thèse de Liyuan Fan sur le peuplement protohistorique au Tadjikistan (IVe-IIe mill.) s’inscrit dans ce programme.

  1. Dir. actuelle F. Brunet. Voir aussi travaux d’H.-P. Francfort, B. Mutin et R. Besenval†. ↩︎

Les fouilles de la MAFBI (Mission archéologique française du bassin de l’Indus, dir. A. Didier et D. Sarmiento Castillo) au Pakistan apportent un nouvel éclairage sur l’émergence de la civilisation de l’Indus et ses liens avec les cultures l’ayant précédée, depuis le Chalcolithique (IVe mill.). Des fouilles extensives sur le site de Chanhu-Daro ont mis au jour, pour la première fois, les vestiges d’un centre urbain planifié dès la 1ère période Indus (2500-2300) comportant des quartiers résidentiels et artisanaux, riches en témoignages exceptionnels et contextualisés du travail des lapidaires. La thèse d’A. Houdas sur la gestion de l’eau dans la civilisation de l’Indus s’intègre à ce programme. Ces travaux comblent aussi d’importantes lacunes sur les relations entre Sindh et Baloutchistan (confins indo-iraniens). Le mobilier de type Indus découvert par V. Charpentier en Oman fait le lien avec l’autre rive du Golfe.

Les fouilles et prospections de la MAFCX (Mission archéologique franco-chinoise au Xinjiang, dir. C. Debaine-Francfort) dans les deltas intérieurs fossiles de la Keriya, front d’exploration au cœur du désert du Taklamakan, ont révélé l’existence d’une civilisation du Bronze nouvellement identifiée et caractérisée grâce à la richesse de la région en biomatériaux remarquablement bien conservés. Restée à l’écart des grands phénomènes d’urbanisation, elle atteste de réseaux d’échanges insoupçonnés, non seulement avec la civilisation de l’Oxus (lithique, céramiques), mais aussi avec l’Indus, les régions himalayennes et les steppes (modes d’inhumation, pierres semi-précieuses, représentations).

Les recherches dirigées par R. Rante (2 missions) complètent ce programme pour les périodes plus récentes (du Ier millénaire avant n. è. à l’époque médiévale) en s’intéressant à l’évolution du peuplement en lien avec les ressources en eau, le développement urbain et l’aménagement hiérarchisé du territoire dans l’oasis de Boukhara (delta du Zeravchan, Ouzbékistan) et le Khorasan (nord-est de l’Iran).