Gaule et Italie les formes matérielles de la romanisation
Ce programme a pour ambition de faire dialoguer centre et périphérie. Le « centre » est ici tout autant l’Italie que Rome même (on a depuis longtemps dépassé une vision trop étroitement romanocentriste de la circulation des modèles). Quant aux provinces gauloises, toute la recherche récente montre qu’elles sont le lieu d’une synthèse réussie, comme leur culture matérielle entre autres le prouve. Synthèse à l’œuvre dans la longue durée, car l’empire romain commence en réalité bien avant l’établissement du Principat par Auguste.
Beaucoup de projets de recherche se sont déjà attachés à l’intégration de la Gaule dans l’Empire, aux modalités de l’acculturation des provinces occidentales, etc. Les objectifs de ce programme sont différents. Il s’agit moins de suivre pas à pas un processus événementiel dans toutes ses implications (le devenir de la Gaule entre IIe-Ier s. av. J.-C. et Haut-Empire…), que d’éclairer, par la mise en parallèle de situations historiques comparables mais distinctes, des débats actuels (à commencer par celui autour du concept de « romanisation », fortement remis en question ces dernières années, mais qui garde beaucoup de sa force opératoire). Il s’agit, sur un autre plan, d’analyser quelques cas où les mécanismes de transfert, diffusion et dérivation (d’objets, de formes architecturales, mais aussi de pratiques, etc.) peuvent être concrètement retracés.
La conquête de l’Italie (343-264 av. J.-C.) et celle de la Gaule (125-51 av. J.-C.) s’effectuent à deux siècles et plus de distance. Elles sont précédées, accompagnées et suivies de processus de romanisation de durée variable. Il peut être néanmoins instructif de comparer, d’un point de vue méthodologique, ces deux phénomènes, malgré l’intervalle qui les sépare. Par exemple, l’émergence des sites de hauteur italiques au IVe s., et celle des oppida dans l’Europe tempérée au IIe s., ont donné lieu à de longs débats… pour l’essentiel non communicants, alors que les mêmes arguments étaient employés de part et d’autre. La même chose pourrait être dite pour la mise en place des éléments de la parure urbaine, ou encore la morphologie de l’habitat. La confrontation de dossiers italiens et gallo-romains donne lieu à des thèses en cours et débouchera sur l’organisation de journées d’études. Les lieux de culte constituent un observatoire privilégié des transformations induites par la romanisation, dans le domaine des formes et de la décoration architecturales, de la typologie des offrandes, des pratiques religieuses que l’archéologie parvient à restituer. Par exemple, les ex-voto anthropomorphes et anatomiques qui sont, dans la Gaule romaine, en bois, en tôle de bronze et en pierre, ont des précédents exacts dans l’Italie républicaine, réalisés cette fois majoritairement en terre cuite. Chronologie et canaux de dérivation sont à affiner. L’accroissement de nos connaissances est ici assuré par des fouilles de sanctuaires dirigées par les membres de notre équipe : entre autres Civita di Tricarico en Italie, Alésia, Châteaubleau, Genainville en Gaule (qui sont trois « sanctuaires de source » – une catégorie longtemps donnée comme allant de soi et dont il est nécessaire de reprendre aujourd’hui l’étude à nouveaux frais).
Autres vecteurs des pratiques culturelles romaines : les théâtres. Ils sont plus de 200 en Gaule, bien plus que dans les provinces d’Espagne ou d’Afrique. Si dans les chefs-lieux, théâtres et amphithéâtres sont construits en conformité avec les modèles romains, ceux que les notables financent dans les sanctuaires ou les agglomérations sur le territoire des cités présentent des modifications et des évolutions spécifiques qui sont à observer dans le cadre de l’histoire de la romanisation des Gaules. Un ouvrage de synthèse sur Les édifices de spectacle en Gaule romaine (P. Aupert, F. Dumasy, dir.) est en préparation dans la série L’Architecture de la Gaule romaine (DAF et Ausonius Editions).
Thèses en cours
- Aniceto L. : Les agglomérations italiques (Vème-IIème s. av. J.-C.). (dir. O. e Cazanove ).
- Attia A. : Étude et contextualisation des ateliers à figures rouges du lucanien récent. (dir. O. De Cazanove).
- Feret S. : Statuettes en terre cuite de l’époque hellénistique en Italie : productions et variations. (dir. O. De Cazanove).
- Lovergne E. : Le mobilier funéraire des nécropoles hellénistiques d’étrurie méridionale. (dir. O. De Cazanove).
- Mogliaccio V. : La maison romaine traditionnelle de la république tardive : évolution et influences hellénistiques. le cas de la maison samnite à herculanum. (dir. O. De Cazanove).