Formation des entités territoriales et échanges interculturels en Mésopotamie (7e-1er millénaires)
Mission archéologique « transfrontalière » du Qara Dagh Occidental (Irak)
Direction du programme : Régis Vallet (jusqu’en 2019)
Cinq campagnes de fouille (2015-2019) dans le cadre d’un programme de recherche dont le but est d’étudier la formation des sociétés complexes, l’apparition des entités territoriales et les processus d’échanges interculturels, dans une région centrale de Mésopotamie qui vient de s’ouvrir à la recherche et par conséquent encore complètement inconnue, le Qara Dagh occidental (gouvernorat de Souleymanieh, Kurdistan d’Irak). Il s’agit d’un programme d’étude pluridisciplinaire de la haute vallée du Tavuq Cay, entre la plaine de Chemchemal et le djebel Qara Dagh, secteur de tout temps propice aux installations humaines à l’interface entre la plaine alluviale et le Zagros, sur la grande route est-ouest. Depuis 2015 deux sites y sont en exploitation, Girdi Qala et Logardan.
Girdi Qala est un tell tabulaire de 15 m de haut offrant une séquence allant du 5e millénaire à la période islamique. Le site s’étend cependant au-delà du tell principal, en particulier sur un tell secondaire au nord, principalement chalcolithique. Le site de Logardan, de 30 m de haut, 1,5 km au nord de Girdi Qala, est établi sur une colline naturelle étagée vers l’est en terrasses, en grande partie anthropiques.
En 2015 trois tranchées ont été ouvertes sur chacun des deux sites. À Girdi Qala, à côté d’une Tranchée A au sommet du tell (D. Parayre et M. Sauvage), une opération stratigraphique, la Tranchée B (L. Colonna d’Istria, Université de Liège), explore l’occupation du site aux périodes tardives (hellénistique, sassanide, islamique), tandis qu’une tranchée C (J. Baldi et H. Naccaro) au pied du tell principal livrait 10 niveaux successifs du début du 4e millénaire, comportant principalement des fours de potiers, associés à du matériel Uruk ancien (méridional). Dans le même temps à Logardan, une tranchée stratigraphique produisait 9 niveaux d’occupation du Halaf au Bronze moyen et une rampe en pierre de l’époque d’Uruk, grimpant le long du flanc abrupt du site, était découverte dans deux autres sondages.
Image : Le tell principal de Girdi Qala en cours de fouille, vu depuis Logardan
En 2016, un chantier au sommet de Logardan (tranchée D, J. Baldi et H. Naccaro) a permis une découverte exceptionnelle, celle d’un bâtiment monumental Uruk ancien. Etabli à la pointe du site et dominant tout le paysage environnant, il est pourvu de puissants soubassements en pierre et repose sur une terrasse à redans en brique. Il est probable que l’édifice ait fait partie d’un ensemble architectural plus vaste au sommet du site, recouvert ensuite par d’importantes constructions au 3e millénaire et des fours de potiers (époque du Dynastique Archaïque et d’Akkad).
Image : Le tell de Logardan en cours de fouille, depuis le sud
Le milieu du 3e millénaire a également était atteint par un second chantier (Tranchée E, M. Sauvage et M. Zingarello), sur la terrasse supérieure du site. Les fouilles ont permis de dégager une voie menant à l’entrée, enserrée de puissants murs, de la petite acropole et un grand bâtiment rempli de matériel de stockage in situ. À Girdi Qala, l’opération stratigraphique B se poursuit et l’ouverture du tell de Girdi Qala Nord a livré 5 niveaux successifs d’habitat Uruk moyen.
Ainsi, les sites de Lorgardan et de Girdi Qala permettent de comprendre l’occupation de cette région clef en au cœur de la Mésopotamie. La découverte de la colonisation, par les Urukiens, de la plaine de Chemchemal dès l’Uruk Ancien (LC2), constitue une découverte majeure pour notre discipline.